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Du 17 au 23 août 2025 : Semaine géologique dans le Champsaur et Dévoluy

Vue vers le nord-ouest : le massif calcaire du Dévoluy, le sillon alpin et le début du Champsaur, piémont sud du massif des Écrins

Retour sur notre traditionnel stage estival de terrain encadré par Thibaud Simon-Labric du CGO Centre de Géologie de l’Oisans qui nous a plongés dans le passé par l’étude de la région du Champsaur au sud du massif des Écrins.

Imaginez-vous être il y a 80 Ma avec au Sud, une chaîne de montagnes, les Pyrénées et au Nord, un massif cristallin émergé, les Écrins résultat d’un chevauchement crustal majeur issu de la compression pyrénéenne orientée nord sud. Plus tard à l’Éocène, sous l’effet de la subduction alpine, nous avons à l’Ouest une plateforme continentale plongeant dans une fosse de subduction dans lequel le massif des Écrins est entraîné et à l’Est un prisme d’accrétion correspondant à la zone pennique ou interne des Alpes actuelles (zones briançonnaise et liguro-piémontaise).

Mais pour reconstituer une histoire, en arpentant le Champsaur, de quels indices disposons-nous ?

  • Au Crétacé inférieur, un chevauchement vers le sud des Écrins sur les étages marno-calcaires callovo-oxfordien du Jurassique.
  • A l’Éocène, une fosse de subduction formant progressivement tous les faciès de la série nummulitique avec à la base les calcaires nummulitiques qui se forment à faible profondeur sur la plateforme du bassin de la fosse de subduction puis les marnes se formant plus en profondeur (sous la CCD) puis les flysch gréseux (les grès du Champsaur) correspondant à des dépôts turbiditiques provenant de l’érosion de la chaîne pyrénéenne plus au sud et enfin les schistes à blocs contenant des éléments issus de l’érosion du prisme d’accrétion (zone interne des Alpes) certainement émergé à la fin de l’Éocène.

Ces 3 jours dans le Champsaur furent un véritable voyage dans le temps et l’espace pour comprendre l’évolution de la paléogéographie issue de la formation des Pyrénées au Sud provoquée par la remontée de la plaque ibérique suivie de la subduction alpine issue de la convergence de la plaque apulienne à l’Est.

Ce stage nous a également permis de découvrir le massif du Dévoluy constitué des étages du Jurassique et du Crétacé.

Le Dévoluy délimite au nord un ancien rift pyrénéen orienté Est-Ouest formé au Crétacé moyen (120 Ma) et bordé au sud par le Ventoux. Il s’agit du bassin vocontien. Avec ses calcaires pélagiques et planctoniques du Crétacé supérieur, le Dévoluy correspond à une transition entre les faciès urgoniens de même âge, plus massifs, de la plateforme récifale établie au nord (dans le Vercors, la Chartreuse et les Bauges) et les terrains plutôt marneux et pélagiques déposés au sud dans la fosse vocontienne.

Outre, identifier tous les étages du Jurassique supérieur et du Crétacé, observer les conséquences de la tectonique pyrénéo-provençale sur ces terrains était fabuleux. Que des plis spectaculaires ! Et des enchaînements grandioses d’anticlinaux et de synclinaux surmontés par un sénonien sommital parfois en discordance sédimentaire sur le Crétacé inférieur.

Le Dévoluy constitue aujourd’hui un grand synclinal perché surmonté du sénonien pouvant même chevaucher les terrains tertiaires par endroit. Ceci est le résultat de la collision qui a débuté il y a 30 Ma lorsque la subduction alpine s’est arrêtée. Tous les terrains, allant du prisme d’accrétion à la zone externe avec le Dévoluy, se sont alors soulevés.

Un stage dans les Alpes sans évocation des glaciations du Quaternaire serait incomplet ; Thibaud Simon-Labric y a pensé !

Quelques exemples de morphologies glaciaires observées :

  • Un magnifique exemple d’ombilic glaciaire référencé au patrimoine géologique national (https://geologie.ecrins-parcnational.fr/site-PAC0005) : le plateau d’Ancelle.
  • Les impressionnantes terrasses lacustres glaciaires de Pellafol formées il y a 45 000 ans grâce au barrage naturel du glacier de la Bonne sortant de la vallée de Valjouffrey. Les terrasses, témoins de cet énorme ancien lac glaciaire, sont aujourd’hui creusées par le Drac canalisé par le barrage artificiel du Sautet. Agréable balade autour de Pellafol-le-Vieux pour arpenter ces monumentaux dépôts lacustres impactés de dropstones et dont l’érosion différentielle a formé de très belles cheminées de fées.

Finalement, à force de stages menés dans les Alpes sous la conduite de Thibaud, nous allons finir par être de fins observateurs des structures glaciaires.

Alors, un grand merci à Thibaud pour ce programme une fois encore très riche et adapté en permanence aux conditions météorologiques.